La « taxe YouTube » a été adoptée ce mardi 6 décembre à l’Assemblée Nationale, et elle s’élèvera à 2% des revenus publicitaires générés en France par les plateformes de diffusions de contenus audiovisuels payantes (iTunes) et gratuites (YouTube, Dailymotion). Maintenant on peut se demander si cette taxe ne risque pas de se retourner contre ceux qui sont censés en bénéficier, à savoir les créateurs…
Taxe YouTube : Les grandes lignes
Cette taxe n’est pas nouvelle, il s’agit pour faire simple d’une extension de celle qui portait déjà sur les vidéogrammes (VHS), étendue ensuite aux DVD, puis à la VOD et enfin, en 2013, à Netflix et dont le but est d’aider à financer les créateurs de contenus sur ces différents supports.
Le produit généré par cette taxe, sera donc reversé en partie au Centre National du Cinéma afin, l’autre partie allant directement dans le budget de l’Etat.
Le Gouvernement, en la parole du secrétaire d’Etat au Budget M. Christian Eckert, s’est déclaré contre ce projet de loi qui, selon lui, ne porterait qu’un coup très minime aux portefeuilles des mastodontes du numérique que sont Google, Apple, Facebook et Amazon (GAFA) par rapport aux montants exorbitants qui échappent à l’Etat Français via l’optimisation fiscale mise en place par ces sociétés.
Toujours selon M. Eckert, seule une réponse Européenne sur le problème de l’optimisation fiscale de ces grands groupes serait productive au contraire de cette taxe dont l’impact réel pour ces entreprises est plus que discutable.
Alors qui va en pâtir ?
Si les annonceurs s’annoncent très inquiets, il semblerait que les premiers dommages collatéraux qu’entrainerait cette taxe pourraient porter sur les créateurs de contenus eux-mêmes.
En effet, les créateurs de contenus ont un rôle prépondérant dans l’existence de plateformes telles que YouTube, car ce sont eux qui, en publiant de nombreuses vidéos qui attirent des millions de visiteurs chaque jour, permettent aux sites de partage de générer d’énormes revenus publicitaires grâce aux espaces pubs qu’elles vendent aux marques.
Mais il est probable que pour protéger leur marge, cette taxe YouTube, puisque c’est le nom qui lui a été attribuée, conduise Google et ses homologues à répercuter la perte due au paiement de celle-ci directement sur les revenus publicitaires qu’ils concèdent aux vidéastes qui publient des vidéos.
Si effectivement les plateformes répercutaient l’impact de cette taxe sur les reversements des créateurs de contenus, alors cette taxe entrainerait paradoxalement une baisse de revenu pour l’ensemble des vidéastes présents sur ces plateformes.
Et cela, les vidéastes l’ont d’ailleurs bien compris. Si bien que certains d’entre eux ont décidé de se mobiliser pour faire entendre leur voix.
Les vidéastes se mobilisent
43 vidéastes rassemblant, selon leur propre calcul, plus de 15 millions d’abonnés francophones ont décidé de cosigner une lettre ouverte aux parlementaires, les appelant à réfléchir au financement des créatifs présents sur ces plateformes.
Leur principale crainte : que le produit de cette nouvelle taxe ne profite finalement qu’aux Networks les plus influents, et donc par définitions aux Youtubers les plus influents qui leurs appartiennent… Exacerbant le déséquilibre déjà existant entre les vidéastes indépendants et ceux qui profitent de l’influence de leurs réseaux.
Par ailleurs, le rôle que jouera le CNC en ce sens n’est pas encore défini. Il a normalement pour but de soutenir la culture en créant des commissions de professionnels qui s’expriment sur tel ou tel dossier, mais les questions portant sur qui fera partie de ces commissions et comment rendront-elles leurs décisions restent aujourd’hui très floues.
Il semblerait donc que nous n’ayons pas fini d’entendre parler de cette taxe YouTube. De par son impact inégalitaire entre les grosses et les petites plateformes de partage. Et de ses répercussions qui porteront vraisemblablement plus sur les acteurs qu’elle entend protéger (les créateurs) plutôt que ceux qu’elles visent (les GAFA)…